Vérité et mensonge
Au moment où Hitler prenait le pouvoir en Allemagne, fin janvier 1933, Fritz Gerlich, rédacteur en chef du journal catholique Der gerade Weg (« Le droit chemin ») écrivait ceci : « Le peuple allemand aura honte un jour qu’un chancelier allemand ait pu prononcer à haute voix un programme de gouvernement qui fasse une telle violence objective à la vérité. »
Pour avoir parlé à propos des discours d’Hitler et des nazis de « violence objective faite à la vérité », Fritz Gerlich sera mis à mort le 30 juin 1934 après 15 mois passés au camp de Dachau. Sa veuve recevra en guise d’avis de décès une boîte en carton contenant ses lunettes maculées de sang.
« Dans notre pays, écrivait Soljenitsyne à propos de l’Union soviétique, le mensonge est devenu non seulement une catégorie morale, mais aussi un pilier de l’État. » Dans ce pays, le premier précepte du KGB était le suivant : « Tout agent a un cerveau pour surveiller sa langue et dissimuler sa pensée. » Un certain Vladimir Poutine, jadis agent du KGB, a bien retenu la leçon. Et comme il a aujourd’hui en face de lui un Joe Biden dont on ne sait s’il dissimule sa pensée mais dont on est sûr qu’il ne surveille pas bien sa langue, la partie n’est pas égale entre les deux.
On aurait pu croire que le mensonge disparaîtrait avec le régime communiste : mais il n’a pas disparu car il s’accommode très bien du capitalisme, ce dernier se nourrissant de multiples mensonges et dissimulant le vol et le pillage pratiqués sur des millions de personnes derrière le mirage d’un partage des richesses qu’engendrerait mécaniquement la croissance économique.
L’éducation à la vérité, c’est-à-dire à ne pas pactiser avec le mensonge et à en assumer les conséquences, est la pierre d’attente de toute vie morale : l’essentiel de l’éducation est donc d’apprendre à ne pas mentir. Car le mensonge ne constitue pas une faute morale parmi d’autres, mais une faute qui pervertit la conscience et qui blesse la dignité humaine.
La guerre est toujours quelque chose de terrible. La guerre justifiée par des mensonges, comme c’est le cas la plupart du temps, ajoute une mort spirituelle aux morts humaines qu’elle entraîne. C’est pourquoi il est si difficile de se relever d’une guerre : il ne suffit pas d’enterrer les morts, il ne suffit pas de rebâtir les villes, il faut aider l’humanité à croire à nouveau en elle-même. Et c’est le défi le plus difficile à relever quand elle a montré jusqu’où peut aller sa capacité de se mentir sur ses pires comportements.