Pour nos étrennes, un Service national ?
POUR NOS ÉTRENNES, UN SERVICE NATIONAL ?
En ces premiers jours de l’année, le serpent de mer du SNU refait surface. Entendez par « SNU » le fameux Service national universel qui était une des promesses électorales du candidat Macron. Ce service « universel » concernera d’abord trois mille jeunes à peine, mais il devrait rapidement en toucher huit cent mille : l’universalité est au bout du chemin.
Selon le site officiel qui lui est consacré, l’objectif du SNU est de « favoriser le brassage social et territorial et [de] permettre à chaque jeune d’être acteur de sa citoyenneté ». Malgré cette présentation très consensuelle, le tir de barrage a bel et bien commencé, et on peut se demander si ce projet n’ira pas rejoindre tant d’autres, mis à mal par les soubresauts de notre société.
L’idée, pourtant, n’était pas sotte. Comme le faisait la défunte conscription, à l’égard de laquelle le discours officiel prend prudemment ses distances, il s’agirait de donner ou de redonner aux jeunes Français, garçons et filles, la conscience d’appartenir à un même pays tout en favorisant l’engagement et la mixité sociale. Et il faut remarquer qu’une forte majorité de 18-25 ans (90% disent certains) y souscrivaient avec enthousiasme.
Que l’on soit pour ou contre, il faut relever l’argument principal des adversaires de plus en plus nombreux de ce projet : c’est le fait que la mesure soit présentée comme obligatoire et que les jeunes « ne savent pas comment ils pourront la concilier avec le reste de leurs activités ». J’avoue que cette manière de dire : « sur le principe je suis d’accord, mais ce n’est pas pour moi car je suis surbooké » me sidère littéralement. Nul n’ignore que tout ce qui fait la cohésion d’une société, qu’il s’agisse de la fiscalité ou de la scolarisation, repose sur le principe de l’obligation. Que signifierait un « service universel » qui serait simplement optionnel ? Une seconde objection me laisse tout aussi pantois que la première : instaurer le SNU, ce serait prendre acte de l’échec du système éducatif, puisque les objectifs qui lui sont assignés auraient déjà dû être atteints au moyen de la scolarisation. Peut-être, mais si ce n’est pas le cas, doit-on jeter l’éponge en disant que de toute façon ces générations sont perdues ? En outre, est-il si vrai de prétendre que le rôle de la scolarisation consisterait d’abord à honorer un « parcours citoyen » ? Cette dimension de l’éducation, certes fondamentale, ne vient-elle pas plutôt en complément de l’instruction élémentaire ?
Une autre question demeure, pour laquelle on n’a pour le moment que bien peu de réponses. L’acquisition de compétences mise à part, quel serait exactement le contenu moral de ce fameux Service national universel ? Oserait-on viser autre chose qu’un très consensuel « vivre-ensemble selon les valeurs de la République » qui ne coûterait cher à personne ? Mais cela, c’est sans doute une autre histoire...